Anthropocentrisme ?
Anthropocentrisme :
Etat psychologique commun, proche de l'aveuglement, qui conduit les Humains à penser que la Terre a été créée pour eux, pour leur usage exclusif.
Ce dysfonctionnement du système nerveux central n'est peut-être pas incurable, mais est transmissible de génération en génération, aussi bien par le père que par la mère. Notre livre est une modeste contribution à la recherche d'une thérapie.
Les civilisations circumméditerranéennes ont été les plus précocement et les plus profondément affectées par cette erreur de parallaxe.
Quels sont les principaux symptômes ?
Les formes les plus graves de la maladie amènent à penser que la Terre a été créée par les dieux afin de permettre aux hommes de se servir jusqu'à l'écœurement (all you can eat !) dans le pot de confiture.
Et comme les dieux ont créé les hommes et ne sont pas fondamentalement mauvais, ils se sont débrouillés pour que le pot de confiture soit infini. Ainsi les hommes ont pu, peuvent et pourront se servir sans vergogne, sans jamais atteindre le fond de l'amphore. Tout y passe : faune, flore, richesses minérales ou organiques.
Convaincu de la taille infinie de la "poubelle", que ce soit les océans, la terre ou l'atmosphère, ils rejettent tout ce qui leur a momentanément servi. La phobie du paiement des "externalités" regroupe plusieurs manifestations des maux.
Une forme particulièrement tenace et transmissible du virus conduit à théoriser que la Nature a besoin des hommes, alors qu'elle a surtout besoin de Libre Evolution. L'homme veut oublier que 99% de la flore et de la faune sauvage vivait en harmonie avant son arrivée, avant l'arrivée de sa "main salvatrice".
Parmi les atteintes les plus sévères au discernement, la cruauté envers les animaux, sauvages ou domestiques, semble encore assez prégnante. Certains patients peuvent en venir à douter de la souffrance physique et affective de leurs victimes. Ce comportement apparaît comme un mécanisme de défense pour éviter le remord de la pratique ludique de la destruction volontaire de la biodiversité.
Depuis quand sommes-nous atteints ?
Que se soit dans les légendes les plus anciennes, tel le mythe de Prométhée, dans la Bible, dans les textes des Lumières ou dans notre constitution, toute notre civilisation est empreinte d'anthropocentrisme.
Corriger cette vision déformée du monde ne se fera pas en un jour, mais il faudra bien se convaincre de l'urgence du changement avant que le Ciel ne nous tombe définitivement sur la tête.
En particulier, en Europe occidentale, et notamment en France, nous devrons opérer un tri sélectif dans les apports des "Lumières" pour garder ce que nous admirons et chérissons (rejet de l'obscurantisme, tolérance, libertés individuelles, égalité devant la loi, refus des exclusions ... ) et remettre en question ce qui nous a conduit dans l'impasse.
Ce livre a, entre autres, pour objectif de fournir des pistes pour entreprendre ce travail salutaire qui n'est en rien irrévérencieux pour les penseurs d'hier.
L'erreur primordiale la mieux partagée au monde.
Les civilisations méditerranéennes ont prospéré autour de ces dogmes. Les religions monothéistes, toutes sectes confondues, ont professé la domination de l'homme sur la Nature, la nécessité de soumettre toute chose animée ou non aux bons vouloirs de l'Homme.
Chez certains peuples et en particulier amérindiens, la croyance en un être suprême, la Terre-Mère Pachamama par exemple, fournissant aux hommes ce dont ils ont raisonnablement besoin, existe aussi. Mais un principe de frugalité, incitant à ne pas puiser plus que de raison, est une vision très différente du "all you can eat".
Ces ontologies sont loin du rationalisme de Descartes, à qui nous devons tant pour asseoir les sciences modernes et rejeter l'obscurantisme, mais qui a aussi conduit à des errements dramatiques. Fondre le meilleur de ces deux cultures dans le creuset d'une Terre réenchantée, dans un humanisme élargi, est encore possible.